Lors de l’enquête publique, la question du porteur de projet a été soulevée. Le rapport du commissaire enquêteur en fait état. Au cours de la réunion publique organisée par le commissaire enquêteur, M. Pierre Liot s’est élevé contre les propos d’un participant qui parlait du « groupe Liot », en refusant le terme de « groupe Liot » et en affirmant que le projet n’était pas soutenu par le groupe Liot. Le dossier sur les capacités financières contredit cette affirmation. Il se termine (page 96) par une présentation de l’évolution patrimoniale du Groupe constitué par les sociétés professionnelles du porteur de projet : SA LPC, SA Liot Châtellerault et SCEA Les Nauds.
La SCEA Les Nauds n’a pas les capacités financières pour porter un tel projet. Afin de prouver les capacités financières, le dossier complémentaire reconnaît que le projet est financé par le groupe Liot. Le dossier complémentaire présente les comptes de l’ensemble des sociétés professionnelles du porteur de projet : SA LPC, SA Liot Châtellerault et SCEA Les Nauds.
L’exploitant est défini dans le Code de l’Environnement comme étant « une personne physique ou morale, publique ou privée, qui exerce ou contrôle effectivement, à titre professionnel, une activité économique lucrative ou non lucrative ». Tous les documents ont été signés à Châtellerault, au siège de Liot Châtellerault et de LPC, et le dossier de financement montre que le projet est contrôlé par la société LPC .
La gérance de la SCEA est assurée par M. Pierre Liot. Le mémoire complémentaire reconnaît que la gérance a été confiée pendant quelques mois à son épouse Mme Annick Liot pour satisfaire à des exigences administratives de la MSA dans le cadre de la liquidation des droits à la retraite de Pierre Liot. En effet, M. Pierre Liot est né en 1938 et pouvait prétendre à la retraite en 2016 à l’âge de 78 ans. Il a repris la gérance de la SCEA en juillet 2017. Il continue à être Président Directeur Général de la SA Liot Châtellerault et de la SA LPC.
L'âge limite reporté à 99 ans
Une limite d’âge est imposée pour le nombre d’administrateurs d’une SA. A défaut de dispositions contraires des statuts, le nombre d’administrateurs ou de membres du conseil de surveillance ayant plus de 70 ans ne peut être supérieur au tiers des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance en fonction. Les statuts peuvent soumettre l’exercice de la fonction de directeur général à une limite d’âge. A défaut d’une disposition statutaire expresse, le directeur général ne peut pas être âgé de plus de 65 ans.
Les statuts de la SA Liot Châtellerault, mis à jour le 22 février 2013, ont porté la limite d’âge à 80 ans : « le nombre d’administrateurs ayant dépassé l’âge de 80 ans ne peut être supérieur au tiers des administrateurs en fonction », « le Directeur Général doit être âgé de moins de 80 ans ». Les statuts de la LPC, déposés le 12 juin 2013, reprennent les mêmes termes. Dans les deux sociétés, le nombre d’administrateurs étant réduit à trois personnes, deux tiers des administrateurs ont plus de 70 ans, et un tiers plus de 80 ans.
M. Pierre Liot : né le 6 janvier 1938. 82 ans en 2020
Mme Annick Liot : née 6/06/1942. 78 ans en 2020
M. Gérard Chatonnet : né en 1953. 67 ans en 2020
Selon les statuts de la LPC de 2013, M. Pierre Liot serait réputé démissionnaire d’office depuis janvier 2018. Mais quand M. Pierre Liot atteint l’âge de 80 ans, les statuts des sociétés Liot Châtellerault et LPC ont été mis à jour (9 février 2018). La limite d’âge a été reportée à 99 ans !
Quel avenir pour les sociétés du groupe Liot ?
L’âge des dirigeants des sociétés du groupe Liot conduit à s’interroger sur l’avenir de ces sociétés. Au fil des années le nombre de sociétaires s’est réduit. Pour ne pas tomber sous le coup de la limite d’âge, les statuts des SA ont repoussé la limite à 99 ans. Pour faire valoir ses droits à la retraite M. Pierre Liot n’avait d’autre solution que placer son épouse comme dirigeante de la SCEA Les Nauds, pour reprendre ensuite la direction.
M. Pierre Liot a conduit une tentative de vente de sa société à CAVAC Développement, dont le siège social est 12 bd Réaumur à La Roche-sur-Yon. L’opération était bien engagée. Lorsque la DREAL réalise une inspection du site le 27 juillet 2016, elle est reçue par M. Patrice Néomie, nouveau directeur du site depuis le début du mois de juillet, qui lui précise que l’établissement était sur le point d’être racheté. (Rapport de l’Inspection des Installations Classées à SA Lio Châtellerault. 27 septembre 2016. Annexé à l’enquête publique ouverte le 7 février 2020)
Dans son rapport l’Inspection fait remarquer que « Lorsque l’installation change d’exploitant, le nouvel exploitant ou son représentant doit en faire la déclaration au préfet dans le mois qui suit la prise en charge de l’exploitation. Cette déclaration doit mentionner, s’il s’agit d’une personne physique, les nom, prénoms et domicile du nouvel exploitant et, s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l’adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire de la déclaration (article R. 152-68 du Code de l’environnement).
Le CA de la SA LPC a autorisé la cession de la totalité des 24 980 actions de LIOT Châtellerault détenues par les SA LPC au profit de la CAVAC Développement. La CAVAC avait le contrôle de la société Liot Châtellerault au 31 juillet 2016. Cette opération a échoué. Le CA a suspendu le processus de cession des titres de la société LIOT Châtellerault. Pourquoi cet événement financier n’est pas mentionné dans le dossier complémentaire ?
En 2016, la société de holding SA LPC (allée d'Argenson 86100 CHATELLERAULT) dirigée par Pierre Liot, a été vendue. Elle est acquise par SA LIOT CHATELLERAULT (Allée d'Argenson ZI Nord 86100 CHATELLERAULT). L’acte daté du 15/09/2016 a été enregistré au SIE POITIERS SUD le 19/09/2016. L’annonce a été publiée dans le BODACC le 20/10/2016. Le montant de la cession s’élève à 100 000 €. Il est bien inférieur à la valeur de la société.
Suite à cette vente, la société de holding SA LPC n’a plus de chiffre d’affaires. Elle est devenue une société holding passive : elle se contente de détenir des participations dans d’autres sociétés, elle n’a pas d’activité propre. Elle n’emploie aucun salarié.
Le compte de résultat prévisionnel de la SA LPC fait apparaître un chiffre d’affaires après les années 2016 de l’ordre de 1.300.000 à 1.400.000 €. L’examen des bilans publiés par la SA LPC montre un chiffre d’affaires nul pour les exercices de 2017, 2018 et 2019. Les comptes prévisionnels présentés dans le dossier complémentaire sont donc en total décalage avec les bilans. Ils ne tiennent pas compte de la vente de 2016.
Pourquoi le mémoire complémentaire ne fait-il pas état de cessation partielle d’activité de la SCEA Les Nauds au 1/01/2017 ?
Cette cessation est attestée par la « Preuve de dépôt n° A-7-MJL3SAQ7R. Notification de la cessation d’activité d’une installation classée relevant du régime de la déclaration. Date de notification : 6/3/2017. »
Quelles sont les conséquences de cette cessation partielle ? Ainsi, on peut supposer que cette cessation modifie le volume de fumier qui devrait alimenter l’unité de méthanisation.
Actuellement le capital social (1500 €) de la SCEA est détenu par Pierre Liot (2/3) et Michel Liot (1/3). Michel Liot envisage de céder ses parts à Pierre Liot. Pour réaliser le projet, la SA LPC, société holding de Pierre Liot, va entrer au capital de la SCEA les Nauds : apport de 100.000 € pour une participation de 50%.
L’apport financier de la SA LPC holding en capital et compte courant pour l’unité d’élevage et la méthanisation (page 69) est conséquent :
· Apport initial : 500.000 € (100.000 € pour la souscription de 50 % du capital et 400.000 € en compte courant)
· Apport complémentaire : 1.450.000 € en pointe sur 3 mois et 800.000 € en solde en fin d’année 5 de l’étude)
« L’équilibre financier du projet est donc assuré par des apports en fonds propres en provenance de la SA LPC holding d’un niveau significatif. Par suite, la présente étude prévisionnelle fournit les éléments de validation des ressources financières présentes et futures du Groupe constituées par la SA LPC et sa filiale principal SA Liot Châtellerault, fournis en annexe. »
Du fait de ces apports, la SCEA devient de fait une filiale de la SA LPC holding. Contrairement à ce qui est affirmé dans la demande d’autorisation d’exploiter, la SCEA n’a pas la capacité financière de porter le projet. Durant l’enquête le public a été trompé, car c’est bien un projet du groupe Liot. Lors de l’enquête, il avait été noté que toutes les pièces avaient été signées au siège de la holding. Le commissaire enquêteur avait expressément refusé cette mise en doute sur le porteur du projet. La demande d’autorisation d’exploiter a caché cette relation avec la holding. C’est cette étude financière qui établit la relation.